Rien ne va. J'en peux plus. J'arrive plus à respirer - ni même à réfléchir. La rage me ronge le palais et me brûle les lèvres. Comme un besoin de m'isoler après avoir bu quelques gorgées de l'eau la plus sèche de ces terres. Le liquide m'avait mordu la gorge jusqu'à atteindre mon coeur qui se tord maintenant depuis plusieurs minutes. Il faut que je parte. Loin de tout ça. Puis attendre ; oui, attendre. Attendre que mon âme batte moins fort - attendre que mes poings ses desserrent. Alors je marche pour aller au seul endroit où je peux envisager de me reposer un peu - là où la chaleur serait capable d'embrasser mes muscles et les laver de toute cette noirceur.
Le chemin ne m'a jamais paru aussi long ; tout comme mes enjambées n'ont jamais été aussi grandes. L'énergie s'empare de mon corps presque incapable de répondre à ma raison - et pourtant, j'arrive à m'échapper du camp. Il faut juste souffler. Oui. Se vider l'esprit. Ne plus penser - et panser mes plaies. Ça passera - tout passe avec le temps. Pourtant, j'ai l'impression que mes instincts primaires refont surface. C'est comme-si un Lycan avait réussi à goûter à mon sang. C'est comme-si je régressais et redevenais celle que je m'interdisais d'être. Insupportable - c'est le mot qui définit mon état. Alors, lorsque je vois son frêle corps casser la solitude de ces lieux ; j'entends un tas de pensées refoulées qui refont surface. Sauf que tout ça, c'est plus fort que moi : les mots sont crachés comme un millier de couteaux qui n'ont qu'un seul but : l'achever. Je me déteste de pouvoir parler ainsi, Je le déteste d'être là alors que je suis comme ça ; plus moi-même.
Purée... Je voulais enfin un peu souffler. Enfin un peu prendre de temps, et te voilà encore dans mes pattes. Quand est-ce que tu réaliseras que je n'ai plus envie de te voir, Finn? La colère qui éclate est mêlée à mon envie de le faire fuir ; je suis un tableau bien trop noir pour lui. Rentre au campement, gamin.
Ça rôde. Tu les sens, malgré les vapeurs épaisses, pareilles à un brouillard humide. Tu es plongé dans ce bain chaud, la nuque jetée en arrière, tes yeux sont clos. Privé de ta vue par tes paupières, dans cette position depuis maintenant plus d’une demi-heure, tes sens ont relayés le labeur à ton ouïe. Tu entends le bruissement de l’eau tout d’abord, léger mais toujours présent ainsi que régulier. Et autour, tu sens les créatures rôder, au loin. Des feuilles mortes écrasées, des branches secouées. Toi tu es là, immobile. Tu ne t’inquiètes pas, tu ne crains pas les alentours. Tu sens seulement que quelque chose d’invisible se déplace, car ça semble faire fuir les présences environnantes. Tu ouvres un œil, puis le second, lorsque tu entends quelqu’un. « Purée... Je voulais enfin un peu souffler. Enfin un peu prendre de temps, et te voilà encore dans mes pattes. Quand est-ce que tu réaliseras que je n'ai plus envie de te voir, Finn? »
Tu te redresses non sans difficulté, comme secoué alors que tu étais endormi, tes sourcils se froncent dans l’incompréhension. « Rentre au campement, gamin. » Tu t’immobilises. En réalité tu ne comprends pas Finn, ce qui se passe, on vient de te lever, on t’as mis une claque et on attend de toi une réaction quelconque. Tu tentes de comprendre, de lire entre les lignes, mais finalement, les mots parlent d’eux-même. Et tu les comprends, malgré toi. Tu te relèves quelque peu, afin d’être assis sur un rebord, ton corps encore dans l’eau, tu passes ta main sur ton visage. « Je sais pas, j’aurais dis que c’était réciproque, au premier abord. » Tu vois bien qu’elle est animée par la colère, que celle-ci est clairement dirigée contre toi. Sans en comprendre la raison, cependant. Elle crache du venin, tu la sens différente. « Je savais pas que le fait d’être Chef te donnais aussi le droit de me virer de mon bain. »
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